La technologie drone sécurisation foncière, garant du développement rural 2020

La technologie drone sécurisation foncière, garant du développement rural 2020

Economie Foncier Technologie
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LA TECHNOLOGIE DRONE sécurisation foncière, garant du développement rural 2020

A Madagascar, la technologie du drone accélère le processus de règlement de conflit foncier, un des problèmes fondamentaux des paysans malagasy. Les données numériques et cartographiques qu’elle fournit contribuent au développement local.

Au sud-est de Madagascar, à Vohilava Mananjary, les images et les caractéristiques topographiques fournies par le drone ont permis de localiser une exploitation minière illicite chinoise. La vue aérienne dégage un dégât environnemental important faisant apparaître une exploitation non respectueuse des ressources naturelles, de la rivière et des champs d’agriculture des paysans, mais aussi de la coutume locale. La rivière ensablée, l’eau salie, les champs accaparés.

Le cas de Vohilava n’est pas isolé. Des exploitations illégales existent dans beaucoup de localités isolées de la Grande île dont l’accès à la vue n’est rendu possible que par le biais d’un drone, dans la mesure où ces sites sont interdits d’accès à personne et souvent sécurisés par des forces de l’ordre. « Ce sont des dégâts environnementaux excessifs, le drone nous a rendu un grand service », affirme Kotondrajaona Rajoelisolo, secrétaire général du BIMTT (Bureau de liaison des Institutions de Formation Rurale). Dans la commune de Sahanivotry, les photos aériennes ainsi que les données numériques du drone ont permis à la Communauté locale d’interpeler les autorités centrales sur le risque d’inondation de 2000 ha de terrains dans le cadre d’un projet de construction d’un barrage hydroélectrique Farihitsara.

 

Le couplage Drone-Carte 3D, à la rescousse de la gestion foncière

 

Le développement de la Grande île passe impérativement par la gestion rigoureuse et la sécurisation des propriétés foncières. 80% des terrains appartenant aux résidants ne sont ni titrés ni certifiés. La contribution du drone y est fortement attendue. D’une part, la technologie drone a la capacité de fournir des informations rapides, réelles et exactes sur des terrains sujets à des conflits fonciers. Elle accélère le processus et augmente le nombre de titres fonciers attribués. D’autre part, les photos aériennes permettent de mettre à jour très vite les bases de données des cartes en relief MP3D (Modélisation participative en 3D), un outil important pour la gestion foncière : délimitation géographique des frontières, emplacement des ressources naturelles, nombre et type des plants, des maisons… « Les communautés ont fabriqué bons nombre de cartes en relief dans différentes régions du pays dont les données sont à mettre à jour régulièrement. Les drones y sont fort sollicités », renchérit le Secrétaire Général. Faute de mise à jour systématique, les cartes 3D peuvent compromettre leur rôle, celui d’informer, de sensibiliser les villageois à prendre des décisions pour le développement de leur terroir.

Dans cette perspective, le BIMTT a mis en place un programme dénommé « Projet d’Observatoire foncier et des droits à l’alimentation adéquate à Madagascar. » Le projet affirme que l’autosuffisance alimentaire à Madagascar demeure une illusion tant que la question foncière n’est pas réglée. Du coup, la sécurisation foncière devient urgente. Ce programme promeut des activités de renforcement de capacité des paysans à bien maitriser leurs situations et connaitre leurs droits en matière foncière afin de défendre et organiser des activités de plaidoyer aux décideurs à tous les niveaux. Le terme foncier concerne la terre, les ressources minières, l’eau et la forêt. Seulement pendant le 2e semestre 2019, 3000 responsables des Eglises (prêtres, religieuses, catéchistes, pasteurs, presbytères) ont été formés sur les droits fonciers pour accompagner les paysans en cas de violation de droit au niveau des villages. Le projet d’observatoire est piloté par des comités de plaidoyer, installés à chaque niveau communautaire. Au niveau villageois, régional et national. Chaque information sur un cas de litige foncier ou autre est signalée, puis analysée par le comité de plaidoyer villageois (CPV) à la base. Les informations vont ensuite franchir tous les échelons, en passant par les Comités de plaidoyer régionaux (CPR) jusqu’au comité national (CRN), chargé d’élaborer un document de plaidoyer, lequel sera soumis aux instances supérieures nationales ou internationales. Les données précises octroyées par les drones ont encouragé ces comités à publier leurs investigations à travers les médias. Aussi, des émissions télévisées sont programmées chaque semaine dans une chaine appartenant au chef de l’Etat en vue de débattre des problèmes liés à la terre. Grâce à la pertinence et à la fiabilité des informations collectées par les drones, le Service des domaines et de la topographie du Ministère de l’Aménagement du territoire n’a pas hésité à adopter leurs résultats.

La technologie Drone ouvre la voie au développement

Outre les actions de plaidoyer, la technologie drone booste le développement agricole. Elle permet d’améliorer l’utilisation du territoire et de ces ressources naturelles et offre aux agriculteurs des données en temps quasi réel sur leurs terres, leurs cultures et leur bétail, les aidant à optimiser l’efficacité des intrants, à réduire les impacts environnementaux et à améliorer la qualité de leur production. A Fénérive-Est, dans le village de Sahoragna, des cartes bathymétriques sous forme de 3D ont soutenu les pêcheurs à localiser les habitats des espèces de crustacés, leurs lieux de ponte, les zones sensibles… et du coup convaincre le ministère de la Pêche sur la nécessité de créer une réserve maritime. Au Nord, dans la province d’Antsiranana, les drones ont permis d’inventorier le statut des terres, en répertoriant les propriétés d’Etat, les propriétés privées et les réserves naturelles en vue d’élaborer une politique de fiscalité locale. Aujourd’hui, les cartes en 3D de la réserve forestière servent d’outil de travail aux guides touristiques locaux. Au Sud, dans la Région de Vakinankaratra, Commune d’Anjazafotsy et au Moyen-Ouest dans la région d’Itasy, les MP3D ont permis à la Communauté de dresser leurs plans de développement local.

Une perspective d’avenir du Drone pour l’agriculture malagasy

Compte tenu de l’importance du service de la technologie de drone, le CTA (Centre Technique de Coopération Agricole et rurale) a dispensé de formation aux responsables du BIMTT. Un atelier participatif, sur l’utilisation du drone dans le cadre de la gestion de l’utilisation des terres et de l’exploitation forestière, a été organisé au Bénin en 2019. La formation est axée sur la compréhension de la sécurité, des principes de confidentialité et des règlementations, de la gestion et du traitement des données de télédétection, du déploiement d’opérations utilisant des drones à Madagascar. Les participants ont acquis des compétences pratiques et des connaissances leur permettant de faire voler différents véhicules aériens sans pilote (unmanned aerial vehicles, UAV)à voilure fixe et multirotor – en toute sécurité et de manière responsable, de choisir le meilleur capteur et logiciel d’analyse pour un objectif donné, de collecter, gérer et analyser des données collectées par un UAV, de concevoir et mettre en œuvre des programmes relatifs aux UAV à Madagascar.

Les représentants malgaches formés à cette technologie s’apprêtent désormais à l’introduire dans leur pays avec le soutien d’Africa Goes Digital Inc. (AfGD), une association professionnelle de fournisseurs de services numériques africains.

 

L’imbroglio de la propriété foncière à Madagascar

La population Malagasy reste très attachée à la notion de la terre ancestrale. L’accès à la terre et aux ressources naturelles s’y rapportant est un facteur de survie et de bien-être des paysans. Depuis les crises de 2008, la terre est devenue une valeur-refuge des investisseurs, mais le contexte de la législation et de la gouvernance foncière à Madagascar tend à favoriser le phénomène. Des titres de propriété existent depuis la colonisation (1896). Des certificats fonciers ont été mis en place dans le cadre d’une réforme foncière en 2005. Mais seulement environ 20% des terrains sont munis de l’un de ces documents légaux. La majorité de la population vit soit sur des terrains qu’ils ont hérités de leurs ancêtres sous le régime du droit coutumier, soit sur des terrains de l’Etat ou d’autres propriétaires, tels que les colons qui avaient obtenu un titre foncier. Les droits légitimes de ces citoyens sans document de propriété ne sont pas toujours reconnus et ils sont expulsés avec ou sans compensation par l’Etat ou par le « propriétaire » dès qu’un projet d’investissement est en vue. La corruption dans le domaine du Foncier aggrave la situation, alors que la terre est souvent le seul bien et le seul moyen de production que possèdent les paysans et la population rurale, majoritaire à Madagascar.

A propos des auteurs: 

Mamy Andriatiana
Directeur Exécutif chez ONG Médiascope
Email: mamyandri2016@gmail.com

Kotondrajaona RAJOELISOLO
Secrétaire Général
Birao Ifandraisan’ny Mpampiofana ny Tontolon’ny Tantsaha (BIMTT)
Antananarivo
Madagascar
Tél: +261 320213543; +261 330274870; +261 202260404
Email: bimtt@moov.mg
Web: www.bimtt.org

 

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