VANF ANTRANONKALA à propos de Manjakamiadana 27 mai 2020
Écrits anciens d’actualité
«Derrière la silhouette retrouvée de Manjakamiadana, c’est le vide absolu. Les cartes postales sont sauves, mais la Culture majuscule ne s’y retrouve pas (…) Il aurait fallu, bien longtemps en amont, bien de décennies avant le 6 novembre 1995, mieux nous occuper de notre patrimoine. De ce côté, aucun travail de conscientisation n’a toujours pas été entamé pour une intériorisation pérenne et durable. Qui commence dès l’école primaire. Dans un pays comme Madagascar, les budgets de la Culture et de l’Éducation devraient être aussi conséquents que celui des Forces Armées»
(Chronique VANF, «Madagascar se consume», L’Express de Madagascar, 28 novembre 2012)
Ici, on veut changer les mentalités ; là, ils ne savent que perpétuer les mêmes attitudes qui, deux fois en l’espace d’une génération, aboutirent au double incendie du palais d’Andafiavaratra (11 septembre 1976) et du Rova d’Antananarivo (6 novembre 1995). Ici, on a compris que c’est l’indifférence à l’Histoire qui permit que l’impensable se produise ; là, ce sont justement les leçons du passé qu’on se refuse à tirer de 1972 à 2002, en passant par 1991.
(Chronique VANF, «L’État culturel», L’Express de Madagascar, 03 novembre 2005)
Une seule voix, celle de l’archéologue Rafolo Andrianaivoarivony (DMD n°759 du 06/12/2001), avait dénoncé le permis de construire de cet immeuble commercial jouxtant le temple d’Ambatonakanga : sa hauteur cache désormais la façade d’un temple pourtant éminemment historique puisque c’est à son emplacement que fut imprimée la Bible en malgache en 1835.
On peut ne pas être chrétien et pourtant assumer pleinement l’histoire de sa Ville. Je m’élèverais avec une égale véhémence contre la défiguration du temple d’Anatirova ou celui d’Ambohidratrimo et contre l’érection de panneaux publicitaires dans la cour du Rova ou d’Andafiavaratra (…)
Des fois, on peut nourrir de légitimes inquiétudes sur les capacités des agents du « Fanjakana » à comprendre pourquoi rien ne devrait être construit dans le périmètre immédiat d’un Rova (un mini-train à Ambohidratrimo ? une école dans la cour du Rova d’Ilafy ? un supermarché attenant au Rova de Tsinjoarivo ?) ; pourquoi cette pharmacie que constitue la forêt d’Ambohimanga devrait être protégée de la prédation des touristes inconscients et des riverains indifférents ; pourquoi les « tamboho gasy » font partie de notre héritage culturel (le tamboho du parc de Tsarasaotra tombe en ruines) ; pourquoi on devrait répertorier, classer et protéger les « trano gasy » les plus emblématiques et les plus caractéristiques de l’architecture tananarivienne et de l’Imerina (Ambohimanarina, Ambodimita, Ambondrona, Ankadifotsy, Antaninandro, etc.) ; pourquoi un permis de construire devrait se soucier surtout de l’aspect général d’une maison qui contribuera soit à l’enlaidissement moderne de la Ville ou bien à la pérennisation de son cachet spécifique ; pourquoi on devrait privilégier l’urbanisation collinaire qui permettrait de sauvegarder les rizières du Betsimitatatra ; pourquoi l’Ikopa mériterait un meilleur sort que de convoyer des eaux usées depuis Ambohimanambola et de recueillir la pollution des zones franches de la plaine de Tana. Procédons au test de la découverte archéologique : si les engins mettaient à jour les vestiges d’un site inédit, suspendrait-on les travaux de construction du By-Pass, en modifierait-on le tracé, et consacrerait-on des fonds pour les fouilles du terrain et l’étude des résultats ? Faute de cette compréhension partagée, le mot « culture » devient un malentendu.
(Chronique VANF, «La culture, ce malentendu», L’Express de Madagascar, 08 mars 2004)
Vanf Nasolo-Valiavo Andriamihaja